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Georges Pompidou : biographie

I. Du fils du Cantal au professeur à Henri IV

 

Georges Pompidou à 3 ans, avec ses parents, Léon et Marie-Louise, 1914

 

Fils d'enseignants, petit-fils de paysans, Georges Pompidou naquit le 5 juillet 1911 à Montboudif, village du Cantal. Il fit ses études primaires et secondaires à Albi. Après le baccalauréat, il prépara son entrée à l'École normale supérieure, à Toulouse puis au lycée Louis-le-Grand à Paris. Il intégra l'École en 1931 et ses années d'étudiant furent pour lui l'occasion de connaître la société et la vie culturelle parisiennes, de nouer de profondes amitiés comme celle qui le lia à Léopold Sédar Senghor et d'avoir une première approche de la politique auprès de la Ligue d'action universitaire républicaine et socialiste [1].

 

Classe de khâgne au lycée Louis-le-Grand, 1931, avec Léopold Sédar Senghor

 

Reçu premier à l'agrégation de lettres en 1934 et diplômé de l'École libre des Sciences politiques, il accomplit ensuite son service militaire à Clermont-Ferrand en qualité d'officier de réserve. Après son mariage, il enseigna pendant trois ans au lycée Saint-Charles de Marseille avant d'être nommé au lycée Henri IV à Paris. Au début de la guerre, il fut mobilisé à Grasse puis envoyé en Lorraine avec le 141e régiment d'infanterie alpine. De retour au lycée Henri IV en juin 1940, il enseigna en hypokhâgne et en classe préparatoire à l'École Nationale de la France d'Outre-Mer [2].

 

Avec une classe de prépa au lycée Henri IV

 

II. La rencontre avec le général de Gaulle et les années d'après-guerre

 

18 juin 1954.
A Georges Pompidou
mon collaborateur depuis dix ans,
mon compagnon, mon ami, pour toujours.
Charles de Gaulle

 

Dès septembre 1944, ses liens d'amitié avec René Brouillet, rencontré dès la classe de khâgne, lui permirent d'entrer au cabinet du général de Gaulle, président du Gouvernement provisoire. Il y fut chargé de suivre les questions de politique intérieure et d'éducation. Au départ du Général en janvier 1946, Georges Pompidou fut nommé adjoint d'Henri Ingrand, commissaire général au Tourisme. Il devint par ailleurs, cette même année, maître des requêtes au Conseil d'État [3].

 

Adjoint au Commissaire général au tourisme, visite aux Baux-de-Provence (1947)

 

Sans toutefois adhérer au Rassemblement du Peuple Français, crée en 1947, il participa à l'aventure de ce parti et resta proche des milieux gaullistes en animant notamment le Comité national d'études présidé par Gaston Palewski. C'est également à cette époque qu'il se vit confier le poste de secrétaire général de la Fondation Anne de Gaulle. Durant cette période, Georges Pompidou fit partie du cercle restreint des proches du Général et cette proximité lui valut d'être nommé chef de son cabinet d'avril 1948 à 1953.

Cette année-là, il entra à la banque Rothschild où il occupa rapidement les fonctions de directeur général et d'administrateur de nombreuses sociétés. Ce fut pour lui l'occasion de participer à la vie économique du pays, d'accroître le champ de ses compétences et d'établir un éventail plus large de relations. Il rédigea néanmoins, durant cette période d'intense activité, trois présentations de Classiques illustrés sur Racine, Taine et Malraux [4].

 

Directeur chez Rothschild 

 

III. Les débuts de la Ve République

 
L'Histoire ne saura jamais tout ce qu'a fait Pompidou pendant ces six mois d'organisation de la Cinquième République
Charles de Gaulle 

Sortant de l'Élysée, décembre 1958

 

L'année 1958 fut celle du retour du général de Gaulle au pouvoir et de Georges Pompidou aux affaires politiques. Dans ce contexte troublé dominé par la question algérienne, le dernier président du Conseil de la IVe République fit en effet appel à lui pour diriger son cabinet de juin 1958 à janvier 1959. Il eut alors un rôle décisif auprès du Général, accompagnant les travaux d'élaboration de la Constitution et encourageant les réformes économiques et monétaires.

Le général de Gaulle élu à la présidence, Georges Pompidou retourna pendant quelque temps vers le monde de l'entreprise en réintégrant la banque Rothschild. Membre du Conseil constitutionnel en 1959, il profita également de cette période pour rédiger une Anthologie de la poésie française. Toutefois, il resta toujours en relation avec le Général, et en particulier il accepta, en février 1961, une mission secrète afin de faciliter les négociations avec le FLN algérien.

 

IV. À Matignon (14 avril 1962-10 juillet 1968)

 

À Matignon, un portrait de Colbert est remplacé par "Peinture", de l'artiste Pierre Soulages

 

Après l'approbation des Accords d'Évian par référendum en avril 1962, le général de Gaulle nomma Georges Pompidou Premier ministre à la place de Michel Debré. C'est ainsi un homme certes expérimenté mais peu connu du grand public qui arriva à Matignon le 14 avril.

L'année 1962 fut marquée par la réforme de l'élection du président de la République. Le choix du suffrage universel direct et surtout le recours au référendum pour faire approuver cette modification constitutionnelle entraînèrent le vote d'une motion de censure et la chute du premier gouvernement Pompidou. Le Général le renomma aussitôt dans ses fonctions, comme il le fit après son élection aux présidentielles de 1965. Georges Pompidou suivit ensuite de près la préparation des élections législatives de 1967 en s'impliquant dans le choix des investitures et dans la campagne. Les résultats ne furent pas ceux escomptés par la majorité puisqu'elle n'obtint qu'une très courte avance. Le Premier ministre fut alors élu pour la première fois député du Cantal.

Les années 1962 à 1968 furent, en politique internationale, guidées par le principe gaullien de grandeur et d'indépendance de la France et, sur le plan intérieur, elles furent marquées par un réel essor économique permettant d'importantes réformes de structures. Georges Pompidou prit une part personnelle très active au développement de l'économie française dans tous les domaines.

La crise de 1968 vint ébranler la République. Depuis Matignon, Georges Pompidou la géra au quotidien, misa sur des mesures d'apaisement, engagea les négociations de Grenelle et préconisa de dissoudre l'Assemblée nationale pour trouver une sortie politique à la crise. Après un départ soudain à Baden Baden, de retour à Paris, le 30 mai, le Général annonça la dissolution. Les élections législatives des 23 et 30 juin 1968 furent un franc succès pour les gaullistes[5].

 

Les négociations de Grenelle, avec Edouard Balladur, chargé des Affaires juridiques et sociales

 

Le 10 juillet 1968, le Général choisit de remplacer Georges Pompidou par Maurice Couve de Murville. Durant cette «traversée du désert», l'ancien Premier ministre se retrouva «simple député» du Cantal et organisa ses bureaux boulevard de La Tour-Maubourg, toujours entouré de quelques proches collaborateurs. Georges Pompidou fut alors profondément blessé par l'affaire Markovic[6]. Le 17 janvier, à Rome, une déclaration de Georges Pompidou fut interprétée par la presse française comme annonçant son intention, le moment venu, de se porter candidat à la présidence de la République[7].

L'échec du référendum sur les réformes du Sénat et des régions entraîna le départ du général de Gaulle et l'organisation de nouvelles élections présidentielles. Georges Pompidou fut élu avec 58% des suffrages exprimés face à Alain Poher[8].

 

V. À l'Élysée (15 juin 1969-4 avril 1974)

 

 

 

 

Georges Pompidou s'installa à l'Élysée le 15 juin 1969. Reprenant la lecture gaullienne de la Constitution, il affirma la prééminence présidentielle. Il choisit comme Premier ministre Jacques Chaban-Delmas, personnalité éminente du gaullisme et ancien président de l'Assemblée nationale. Celui-ci resta durant trois années à la tête du gouvernement, avant de démissionner en juillet 1972 à la suite de tensions relatives à son projet de «nouvelle société» et au partage du pouvoir au sein de l'exécutif.

Le gaulliste Pierre Messmer, ministre des Armées du Général, fut alors appelé par Georges Pompidou à Matignon. Il fut ainsi Premier ministre lors des législatives de 1973, remportées par la majorité face à une gauche réorganisée depuis l'adoption du Programme commun. Il resta à ce poste jusqu'en 1974 et c'est à la fin de cette période que le chef de l'État tenta la mise en place du quinquennat.

Président de la République en 1969, il revint désormais à Georges Pompidou de conduire la politique étrangère. Reprenant les grands axes de la politique gaullienne, il s'efforça d'assurer l'indépendance de la France sur la scène internationale tout en tenant compte de l'évolution de la situation (nouvelle politique américaine avec Nixon arrivé au pouvoir en 1969, Ostpolitik allemande à partir de 1969, puissance croissante de l'URSS, tensions au Moyen-Orient). À ces fins, après les tensions des années passées, il noua des contacts plus confiants avec les États-Unis. Tout en demeurant dans le cadre de la solidarité atlantique, il poursuivit les échanges politiques et économiques avec l'URSS. La relance de la construction européenne marqua également son mandat. La conférence de La Haye en décembre 1969 adopta ainsi son programme «achèvement, approfondissement, élargissement». La Grande-Bretagne put alors devenir membre de la Communauté avec l'Irlande et le Danemark.

À la suite de la crise politique et économique internationale provoquée par la guerre du Kippour (octobre 1973) Georges Pompidou accentua encore plus l'orientation européenne de sa politique : à ses yeux l'Europe des Neuf devait se donner les moyens de rééquilibrer l'Alliance atlantique, de contribuer à la cohésion occidentale face à l'URSS, d'encadrer une R.F.A. désormais engagée dans l'Ostpolitik.

Sur le plan national, Georges Pompidou fit de sa présidence un temps fort pour l'industrialisation du pays. Il mit l'accent sur la modernisation des structures tout en demeurant soucieux de préserver les grands équilibres. La politique sociale accompagna ce mouvement avec quelques grandes décisions telles la mensualisation des ouvriers ou encore l'actionnariat des salariés. Ce lettré devenu homme d'État s'intéressa aussi avec passion au domaine culturel puisque son attachement à l'art et sa volonté d'en assurer la diffusion auprès du plus grand nombre le conduisirent à décider la création à Paris d'un centre d'art contemporain, qui porte aujourd'hui son nom.

Les années Pompidou s'inscrivent enfin au cœur d'une période de profondes mutations économiques de l'Occident. Marquant la fin de la présidence, la crise pétrolière de l'automne 1973 inaugura de nouveaux rapports internationaux et les pouvoirs publics furent dès lors confrontés à d'importantes difficultés économiques et sociales. Son mandat fut écourté par son décès le 2 avril 1974 à Paris.

[1] Georges Pompidou, Pour rétablir une vérité, Paris, Flammarion, 1982, p. 11-19.

[2] ibid., p. 19-28.

[3] ibid., p. 31-49.

[4] ibid., p. 49-90 et 119-146.

[5] ibid., p. 179-207.

[6] ibid., p. 255-266 et 269-272.

[7] ibid., p. 266-269.

[8] ibid., p. 273-279.